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louloute le 3/4/2008 13:43:00 (10630 lectures )
Aurélie dans Miss Ebene - Avril 2008
Aurélie Konaté est Joséphine Baker Qui a dit qu'il n'y avait pas de vie après la Star Academy ? Aurélie Konaté de la promo 2002 poursuit son chemin d'artiste. La belle métisse évolue de projets en projets, discrète et polyvalente. Depuis le 12 mars 2008, elle est Joséphine Baker au petit théâtre Daunou, un rôle que la jeune femme incarne à merveille, tour à tour sensible, emportée, touchante et drôle.
Le rôle de Joséphine est-il venu à toi ou es-tu allée le chercher?Il est venu à moi, on peut dire que c'est un hasard heureux comme cela arrive parfois. J'avais été choisie pour le rôle de Betty Quette dans le conte musical
Le soldat Rose. Au moment où je devais aller signer le contrat, un ami m'appelle pour me dire qu'il a une amie qui cherche quelqu'un pour le rôle de Joséphine Baker. J'ai rencontré le metteur en scène Rubia Matignon, le lendemain elle m'a présenté le projet, et j'ai dit oui. Ce rôle est vraiment une chance de montrer un peu plus mes talents de comédienne.
Ton interprétation est clairement réussie : l'accent, les mimiques tu t'es vraiment imprégnée de Joséphine, comment as-tu préparé ce rôle?J'ai regardé pas mal de documentaires, de reportages et écouté des disques. Même si on l'entend rarement parler, j'ai essayé de me dire que c'était une américaine qui était à Paris depuis pas mal de temps, je me suis aussi imprégnée de gens et d'acteurs qui parlent français. J'ai essayé différents accents et l'un d'entre eux s'est naturellement imposé. Ma voix est beaucoup plus pincée, Joséphine est une femme qui sait ce qu'elle veut. J'ai aussi intégré sa grimace ( lorsqu'elle louche ndlr) mais j'avoue que je n'ai pas cherché à reproduire chaque mouvement. Ce qui est étrange c'est que j'ai l'impression qu'elle n'est pas très loin quand je joue, qu'elle m'aide énormément.
En 2003, tu sortais de la Star Ac', dirais tu aujourd'hui que cette émission t'a apporté ce que tu étais venue y chercher ?Au départ, j'y étais allée pour avoir des cours de chant, de danse et de comédie que je ne pouvais pas me payer. Elle m'a surtout apporté une vraie confiance en moi, et la certitude que c'est bien ce que je voulais faire de ma vie.
On a pu te voir dans pas mal de projets comparé à d'autres anciens élèves, as tu traversé des moments de doute malgré tout ?Oui, plein, même si j'ai eu beaucoup de chance. J'ai peut être aussi fait les bons choix, même si certains m'ont amené à ne pas travailler pendant quelques temps. On m'avait proposé de faire "Salut Joe" avec un regroupement d'anciens de la Star Ac', c'était une période où je n'avais pas beaucoup de travail, c'était un peu dur mais j'ai dit non car je ne voulais pas retomber dans l'étiquette Star Ac' et que surtout j'aurais du mal à faire après quelque chose de différent. Finalement on m'a proposé plus
Les Monologues du Vagin. J'ai eu des moments de doutes car j'ai quand même réalisé un album qui n'est pas sorti, on se remet en question après ça ce n'est constructif que si on a la démarche d'aller en avant.
Tu interprètes une période pas très reluisante de la vie de Joséphine Baker, elle dans le creux de la vague, elle ne se produit plus. Pourquoi Jacques Pessis, auteur de cette pièce a-t-il choisi de mettre cette période de sa vie en avant?Parce que c'est une période que les gens ne connaissent pas. Peu de gens savent qu'elle a fait partie de la Résistance, qu'elle a mis tout son argent dans les causes qu'elle défendait. C'était une femme pleine de combats. Il avait envie de montrer la femme et pas seulement l'artiste avec la ceinture de bananes.
Quels points communs t'es tu trouvés avec Joséphine Baker ?Même si je ne milite pas parce que je n'ai pas encore les bons arguments, je regarde beaucoup ce qui se passe dans le monde, je suis l'actualité...Le racisme est quelque chose que j'ai vécu, que mon père a vécu, que mes frères et soeurs ont vécu, que ma mère aussi a vécu par notre intermédiaire alors forcément je me sens proche d'elle. Je fais partie des "minorités visibles" donc cela me touche personnellement. Le fait de vouloir fonder une famille et d'avoir une certaine stabilité est aussi quelque chose qui me touche car je n'ai pas encore d'enfant et je n'ai personne dans ma vie qui pourrait me donner envie de passer ce cap.
Il n'y a quasi aucune chanteuse noire sur la scène musicale française, comment l'expliques-tu ?Ah bon ? Mais il n'y a malheureusement pas que dans la musique qu'il n'y a pas de blacks. Des chanteuses blacks, j'en connais plein mais elles ne percent pas. Je trouve cela vraiment dommage car beaucoup ont du talent, moi même j'ai encore du mal à faire mon chemin car je pense que l'on nous attend dans un style de musique bien précis, comme le rap et le rn'b. Si je n'arrive pas en bimbo à la Beyoncé ou en Amerie, je me demande si ça marchera. Même si j'aurais plus envie d'arriver avec un truc un peu plus frais, un peu plus pop. Les directeurs artistiques ont peut être aussi des stéréotypes en tête : " Comment ? T'es black et tu veux faire du rock ? Ah non !" Ceux qui veulent percer ne sont peut être pas en adéquation avec ce que les maisons de disques attendent.
Où en es-tu dans la préparation de ton album ? C'est assez délicat, je ne veux rien dévoiler car je suis en train de faire un espèce de virage. J'ai envie d'être moi, j'ai marre, j'en ai marre qu'on me dise ce qu'il faudrait que je fasse pour que ça marche. Déjà j'ai envie de chanter en français, peut être que cela surprendra les gens. Aujourd'hui je compose et travaille sur mes chansons afin de garder mon identité propre.
Ton père est originaire de Guinée Conakry, es-tu déjà allée dans ton pays d'origine ?Malheureusement non, car j'ai un papa qui est assez secret qui ne nous a pas trop parlé de son enfance. Il commence tout doucement. J'ai toujours été en demande mais cela ne s'est jamais fait. Il ne trouvait peut être pas les mots à ce moment là, mais c'est vrai que j'ai un gros manque, comme si je n'étais pas finie. J'ai la couleur, on voit que je suis métissée mais je n'ai pas les mots pour exprimer cela parce qu'on ne me l'a pas inculqué. Mais j'irai un jour, ça c'est sûr.
Jo et Joséphine au Théâtre Daunou du mardi au vendredi à 20h30, le samedi à 17h00 et 20h30
Réservations : 01 42 61 69 14 et points de vente habituelsPropos recueillis par Alexandra Méphon. Miss Ebene Avril 2008
Photo: Alx et Dom photo/ Make up: Sandra Juge